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31/05/2014

La peur au ventre.

Cette expression symbolise bien mon ressenti concernant ce que je veux évoquer dans cet article.

Avoir la peur au ventre, ce n'est pas avoir peur tout court, à un instant précis, non c'est avoir présenti quelque chose qui nous fait peur, viscéralement, dans le ventre. Une peur anticipée, présente dès qu'on pense à cette possibilité effrayante.

Cette peur au ventre, je l'ai depuis toujours et j'ai souvent dit à mon mari ou à mon entourage que c'est vraiment un truc que je crains.

Cette peur au ventre est super égoïste alors qu'elle concerne un sujet qui touche l'humain au sens large.

Cette peur concerne la montée incessante du front national. Cette montée qui n'est pas dûe qu'à la colère, l'exaspération, la crise mais bien à l'intolérance, le repli sur soi, la bêtise, l'intellectualisme, bref tout ce qui, depuis toujours, a fait gagné, un jour, le fascisme.

Alors pourquoi cette peur au ventre ????

Parce que ce que je redoute depuis toujours arrive petit à petit c'est à dire la prise de position de mes enfants, de ces êtres qui sortent de mon ventre et pour lesquels je ressens un amour indescriptible.

Hier, lors du repas, j'ai demandé aux enfants s'ils avaient un peu parlé des élections au lycée...et là, mon fils interne nous a expliqué qu'il n'en pouvait plus de sa chambre, remplie de fachos.

Il nous raconte que l'un de ses camarades de chambre a des propos très extrémistes et qu'il a envie de le baffer à chaque fois qu'il ouvre sa bouche.

Je découvre alors que mes enfants ont discuté entre eux de tout cela, qu'ils ont envisagé d'aller à la manif anti-FN de la ville mais qu'ils n'ont pas osé nous demandé de les véhiculer et même que mon fils interne avait envisagé d'aller à la manif parisienne mais que bon, il n'avait plus assez d'argent de poche pour se payer un billet de train.

Je suis sidérée et cela sur plusieurs plans que je n'exposerai pas ici.

Mais la voilà, ma peur au ventre, elle est là, en moi, depuis longtemps concernant ce sujet.

Je redoute cet instant où mes enfants iront manifester et prendront forcément des risques.

Aux prochaines présidentielles, ils auront presque 18 ans, cet âge où l'on croit que tout est encore possible, que presque tout seul, on peut changer le monde et qu'à plusieurs, alors là ce sera encore plus fort. Cet âge où l'on ne mesure pas le danger. Cet âge où on ne demandera plus à maman si on peut aller à la manif, cet âge où on se débrouillera pour trouver un billet de train.

Cet âge où on n'a pas la peur au ventre.

J'ai toujours craint que ce parti mène à une guerre civile, à des violences entre les pour et les contre et j'ai toujours craint que mes enfants fassent parti de ces gens qui défendront leurs idées.

Notre génération a vécu la menace mais pas aussi présente que maintenant et à part le 21 avril 2002, je n'ai pas forcément éprouvé la nécessécité d'aller manifester, d'aller contrer.

Mais là....j'ai la peur au ventre, plus pour mes enfants que pour moi.

Je me rassure en me disant que mon fils a eu l'envie de lui mettre des baffes mais qu'il a su se retenir....qu'il ne lui a pas cassé la gueule à ce camarade de chambre mais ma peur au ventre me fait quand même penser " et si un jour, c'est à lui, mon fils, qu'on casse la gueule, parce qu'il est allé défendre ses idées ?"....

Alors peut-être que malgré ma peur au ventre, à mon tour, j'aurai envie de casser la gueule.

Le FN aurait gagné la généralisation de la violence.

Ma peur au ventre doit me conduire à éduquer mes enfants et les inciter à défendre leurs idées pacifiquement.

Ma peur au ventre ne doit pas m'empêcher de combattre.

Ma peur au ventre doit être une force et non une faiblesse.

30/05/2014

La commode.

La commode de mémé ne livrera jamais tous ses secrets même si j'en connais certains.

Cette commode, c'est l'un des trois meubles qu'elle a raménés de Tunisie en 1960. Comme elle disait, on l'avait "chassée" avec...

Une commode à 5 tiroirs et un dessus en marbre.

Une grande malle

Une machine à coudre.

Ses 5 enfants, son mari.

Un peu de linge et de vaisselle.

Combien de fois l'ai-je entendu me raconter cet épisode violent de sa vie, ce bateau, cette arrivée et tout ce qui a suivi...les difficutés, la pauvreté, la barrière de la langue.

Mais ils étaient ensemble, même séparés du reste de la famille partie en Italie ou dans une autre région de France, eux, mémé, pépé et les 5 enfants étaient ensemble et ça, c'était l'essentiel, elle le répétait.

Ils étaient aussi avec la commode, la malle et la machine à coudre.

La grosse malle, j'y ai passé des heures et des heures, assise dessus à réviser mes leçons, rêver, pleurer, chanter et quand mémé  a été installée en maison de retraite il y a 4 ans, je lui ai demandé cette malle. Elle était contente que je l'installe chez moi.

La machine à coudre est allée chez mon cousin.

Mais la commode, elle a réussi à l'avoir avec elle, dans sa petite chambre, jusqu'à la fin.

Elle contenait alors son petit linge, quelques souvenirs, quelques foulards ou châles. Et dessus, sur le marbre, nous avions mis les cadres de ses photos préférées, son mari, ses enfants, ses petits-enfants, ses arrières-petits-enfants. Elle aimait cette commode.

Mon cousin avait dit qu'il souhaitait cette commode mais voilà qu'il ne l'a pas voulue.

Cette commode dont je ne connais pas toute l'histoire, j'y suis très, très attachée, la famille me la propose, je l'accepte.

Ma maman a vidé la commode, non sans émotions...et là, un clin d'oeil de mémé....

Il y a 5 ans, lors de la communion de mes deux garçons, mémé veut donner un billet à ses arrières petits enfants mais voilà, impossible de mettre la main sur la somme d'argent retiré en espèces par mon père en début de mois...mémé commençait à avoir des périodes de perte de mémoire ou autre mais comme elle cachait tout le temps ce qui lui était précieux ( elle avait tant manqué de tout qu'elle agissait ainsi pour beaucoup de choses, pas que pour l'argent), nous avions cherché l'argent donné par papa à mémé et la carte bleue....partout....lors du déménagement à la maison de retraite, nous avons vidé tous ses meubles, armoires, tout trié, partagé, jeté mais nous n'avions jamais retrouvé cet argent.

Mais la commode, elle, nous l'avions juste un peu rangée puisque c'était l'unique chose personnelle qu'elle emmenait avec elle et il ne fallait pas y mettre trop nos mains, elle la voulait telle qu'elle !!! Nous avions quand même réorganisé les tiroirs et le rangement intérieur de son linge.

Mémé, malgré ses pertes de mémoire, avait bien compris qu'elle avait perdu cet argent, elle s'est énervée à se rappeler, on l'a un peu houspillée, nous pensions tous que c'était parti à la poubelle.

Mardi dernier, maman , cette fois, a complètement vidé la commode, les photos, les foulards, le petit linge, les châles et là, dans le troisième tiroir, sous une fine double  couche de papier de soie que mémé aimait tant poser au fond de ses tiroirs, apparait un porte carte bleue avec à l'intérieur la carte bleue et le ticket de retrait et 370€ de sa pension mensuelle.

Maman est tombée à la renverse.

Maman m'a téléphoné en larmes.

Nous avons pleuré et nous avons ri.

La commode livrait un dernier secret visible.

Pour les autres secrets encore enfermés en elle, il suffira de les deviner, de les imaginer et de  faire vivre ceux que nous connaissons.

La commode est dans notre maison, mon mari va consolider les tiroirs afin qu'elle ne se casse pas quand nous l'utiliserons.

La commode restera à jamais SA commode.

22/05/2014

C'est la vie.

Rire et pleurer c'est la vie.

Dire au-revoir à sa grand-mère chérie de 96 ans, c'est la vie.

Demain, je lirai le texte écrit dans mon adolescence et recopié dans mon blog le 26 juillet dernier.

Pleurer en famille c'est la vie.

Se remémorer tant de choses, c'est la vie.

Continuer de préparer la journée de première communion de notre fille qui a lieu ce dimanche, c'est la vie qui sourit.

Aller travailler comme si de rien n'était, avec un coeur alourdi, c'est la vie.

Ecouter nos grands en concert ce soir et demain soir, c'est la vie.

Faire les courses pour le repas de famille, c'est la vie.

Maintenir le rendez-vous chez le coiffeur de demain matin, c'est la vie.

Quand la boucle infinie de la vie est respectée, on accepte plus facilement de se dire que c'est la vie.

Mais quand même, quand je l'ai vue hier, j'ai bien compris que c'est la mort.

La mort face à la vie.

La mort pour une autre vie.

Notre vie qui continue grâce à tous les instants de vie vécus ensemble.

C'est la vie avec ses tristesses comme celles de ces jours-ci.

C'est la vie avec ses joies vécues et à venir.

C'est la VIE.